L'auteur invitée au festival Quai du Polar !
Sainte-Marie-La-Grise. Son cadre exceptionnel près de la Côte d’Émeraude en fait une destination de vacances des plus prisée. De magnifiques paysages, un mystérieux folklore breton et des morts qu’on a aidés à trépasser raviront les plus aventureux d’entre vous.
Profitez de l’hospitalité chaleureuse des habitants qui sauront vous mettre à l’aise.
Afin d’apprécier pleinement votre séjour, veillez cependant à respecter trois règles :
1 – Écoutez toujours les murmures de ceux que vous ne voyez pas.
2 – Gardez-vous des creatures sinistres qui frappent avant d’entrer.
3 – Soyez sage. Très sage.
Policier
Aventures
Humour
Émotions fortes
Folklore
Duo de choc
Sortie : Mars 2016
Format : 14x21cm
Interêt des éditeurs poche :
Duo de personnages qui renvois aux duos mythiques (Holmes & Watson, Poirot & Hastings)
Forte communauté de suiveurs
Série
Bande annonce
Entraînant le lecteur dans la Bretagne des années 1950, Oren Miller brosse le portrait vitriolé d’une petite ville hantée par les figures aussi féeriques que monstrueuses des Vouivres, des Dames Blanches et autres Lavandières de nuit.
Elle y décrit les aventures effrayantes et trépidantes d’un duo d’enquêteurs improbable, formé par un notaire haut en couleurs et
son commis, que la mort d’une cliente va plonger dans une abominable affaire.
Présentation de l'auteur
Présentation de l'ouvrage par l'auteur
NOM : Isabeau Le Du
ÂGE : 24
NATIONALITÉ : Française
LIEU DE NAISSANCE : Inconnu, abandonné à Saint-Malo
ÉTAT CIVIL : Célibataire
PROFESSION : Homme à tout faire d’un avocat de Rennes
Rêveur, enthousiaste, très ambitieux. Il compense le traumatisme de son séjour dans un orphelinat qui l’a privé d’une éducation à la hauteur de ses aspirations par une soif inextinguible de connaissances et d’aventures.
Ses cheveux noirs épais, et un peu longs sur la nuque et les oreilles, auraient mérité d’être disciplinés selon les codes de la mode en vigueur qu’Isabeau avait lus dans les magazines. Il tricha en plaquant sa chevelure en arrière et en vissant sur son crâne sa casquette gavroche pour coincer le tout. Naturellement glabre, il avait l’air d’être rasé de près sans toutefois avoir à le faire. Sa peau blanche et harmonieuse, marquée d’un grain de beauté sous l’œil droit, et d’une discrète fossette sur le menton, trop féminine à son goût, faisait de lui un garçon plutôt très agréable à regarder. Pour l’occasion il avait enfilé ses plus beaux habits, un pantalon à pinces marron clair, et une chemise aussi blanche que possible recouverte en partie par un pull côtelé sans manches, lequel dissimulait de jolies bretelles. L’ensemble pouvait donner le change si on ne s’attardait pas sur les détails trahissant l’usure de ses chaussures et le rafistolage à répétition de ses vêtements.
«
»
NOM : Évariste Fauconnier
ÂGE : 37
NATIONALITÉ : Française
LIEU DE NAISSANCE : Congo
ÉTAT CIVIL : Veuf
PROFESSION : Notaire
Indécrottable cynique, provocateur, brillant et condescendant. Il a un grand penchant pour le mysticisme qu’il n’assume cependant pas.
Isabeau se trouva nez à nez avec un homme à la trentaine bien consommée, voire consumée,
aussi grand que lui, et à l’élégance vestimentaire assez éloignée de l’idée de sobriété
et de discrétion. Comble de tout, il avait troqué le haut-de-forme contre un fédora couleur chocolat.
— Monsieur Fauconnier ? tenta Isabeau avec la plus grande assurance dont il pouvait faire preuve, en l’occurrence assez peu, Monsieur Évariste Fauconnier ?
— C’est bien cela, jeune homme, répondit le notaire d’une voix charmante avant de se saisir
du journal tenu par Isabeau, vous êtes donc le service que me doit mon vieil ami Jacques.
Isabeau acquiesça bien qu’il pensât que verbaliser la réponse eût été plus professionnel.
— Quel est votre nom ?
Se présenter. Pourquoi cela ne lui avait-il pas traversé l’esprit plutôt que la déception de ne pas voir de haut-de-forme ?
— Henri Le Du, s’empressa-t-il de répondre par souci d’efficacité.
Le notaire eut un léger mouvement de tête. Tout dans ses traits de visage, droits et symétriques, révélait une nature volontaire et affirmée. Quant aux billes luisantes de ses yeux clairs, l’étincelle puissante jaillissant à chaque battement de paupières ne cachait rien de la vivacité de son esprit.
«
»
ATTENTION - SPOILER - ce résumé dévoile l'intrigue complète et le coupable.
Connaître la conclusion peut nuire au plasir de lecture.
Évariste Fauconnier fit signe au serveur d’apporter du thé à la table qu’il occupait avec son commis, Isabeau Le Du, et sa vieille amie Agatha Mallowan.
― Ce fut, je ne vous le cache pas, l’affaire la plus délicate sur laquelle j’ai dû travailler, déclara Évariste en jouant distraitement avec un sucre.
― Justement, répondit miss Mallowan, comment avez-vous été mêlé à ce cataclysme dont toute la Bretagne aura bien du mal à se remettre ? En bon notaire, n’étiez-vous pas censé vous occuper uniquement de la succession de votre amie Catherine Lozac’mher ?
― J’aurais dû. Mais, voyez-vous, au moment précis où elle s’est sentie mourir, elle a prononcé ces paroles étranges : « n’est-ce pas un bon coup, Monsieur ? ».
Son interlocutrice tiqua. La lumière intense qui éclaira ses yeux attesta de l’intérêt grandissant qu’elle éprouvait face à la tournure que prenait la conversation.
― C’est en effet bien curieux.
― Personne ne pensait que c’était important, parce que personne n’avait compris ce qu’elle voulait dire. Or, cela ne pouvait être plus clair : Catherine avait été empoisonnée et c’est à moi qu’elle adressait ce message.
― Comment cela ?
― Elle et moi partagions la même passion pour l’affaire des poisons qui a entaché le règne de Louis XIV.
― Oh, je me rappelle votre impressionnante collection d’ouvrages historiques à ce sujet et ce qu’elle vous a coûté, sourit la vieille dame avec une pointe de maniérisme britannique.
― Collection qui s’est avérée fort utile, puisque j’ai pu retrouver dans un ouvrage les mots exacts prononcés par Catherine, qui étaient en réalité ceux du bourreau de la marquise de Brinvilliers, la plus célèbre empoisonneuse de l’époque.
― Vous en avez donc conclu qu’elle avait été empoisonnée parce qu’elle vous adressait cette sorte de clin d’œil ? C’est une conclusion un peu tirée par les cheveux, non ?
― Il fait tout le temps ça, nota timidement Isabeau avec fatalisme.
― Je vous l’accorde, répondit Évariste en bon joueur, mais le fait est qu’une série de petits détails est venue me conforter dans ma conviction. Tout d’abord l’inquiétude de ses enfants : Dorian et Agathe. Ils m’ont affirmé qu’un peu avant sa mort, leur mère se sentait épiée et terriblement angoissée. Ensuite, il y a eu la lettre que Catherine, elle-même, m’a envoyée un peu avant sa mort et qu’on ne m’a transmis qu’après son décès. Elle y mentionnait une profonde culpabilité qui la rongeait depuis des années et dont elle voulait se soulager auprès de moi. J’ai acquis la conviction que Catherine savait quelque chose, ou avait fait quelque chose, dont elle avait honte. Cette chose pouvait être assez grave pour impliquer quelqu’un d’autre qui aurait pu vouloir la faire taire. Car Catherine était extrêmement riche et ne fréquentait que les milieux influents de la région.
― Je crois bien avoir croisé cette femme une ou deux fois à l’occasion de plusieurs galas de charité organisés par le comité de ville de Sainte-Marie-La-Grise. C’était sa région d’origine, je crois.
― Exactement. Il est intéressant que vous parliez du comité parce que très vite, mes investigations…
Isabeau émit un léger toussotement.
― Nos investigations, corrigea Évariste en souriant, nous ont très vite menés sur la voie de ce fameux comité de ville et, surtout, ses éminents membres. Cette association centenaire était omniprésente dans la vie sociale et culturelle de la région. Catherine n’avait que du mépris pour elle, car en maniant des sommes colossales de subventions, elle avait tendance à faire la pluie et le beau temps dans les villes alentours.
― Je me souviens que son président, Victor Duval, était une sacrée personnalité. Un seigneur en son royaume.
― Et Sainte-Marie-La-Grise est un royaume bien étrange, vous pouvez me croire. Il pourrait être sorti d’un conte sombre plein de mystères et de superstitions.
― Vous faites allusion à cette croyance très ancrée des habitants en l’existence du petit peuple invisible ?
Isabeau ne put retenir un frisson.
― En effet, je me suis vite trouvé face à un climat très singulier où le quotidien des bourgeois de cette bourgade était autant mêlé de rationalité que rituels liés aux fées des houles, aux lavandières de nuit ou aux dames blanches. La mort de Catherine et, peu de temps après, celle des propriétaires de l’herboristerie la plus connue de la région, trois notables connus, avait d’autant plus crispé les esprits. Même le maire de Sainte-Marie et le recteur de la paroisse de Dinard, le père Joachim, deux personnalités pourtant très respectées, ne parvenaient pas à remettre un peu de calme dans les esprits échauffés.
― Bien, Catherine avait donc été assassinée. Et soudain, vous trouvez le corps mutilé de Victor Duval.
― J’étais face à deux meurtres. Et si on pouvait toujours ergoter sur celui de Catherine, la découverte et la mise en scène macabres du corps de ce pauvre Duval n’ont jamais laissé planer aucun doute. Deux assassinats, il me fallait donc trouver le lien.
― Nous avons ainsi cherché ce qui pouvait lier Catherine Lozac’hmer et Victor Duval, intervint Isabeau avec un air de léger défi.
― Nous avons donc choisi de remonter la piste de l’argent, reprit Évariste, parce que c’est bien ce que Catherine et Victor avaient en commun. De très importants capitaux circulaient entre le comité de ville et la commune de Sainte-Marie. Ils arrosaient toutes les institutions et tous les événements de Sainte-Marie jusqu’à Saint-Malo. Mais Catherine était une indépendante qui agissait sur le terrain, tandis que Duval se servait des bonnes œuvres pour faire de la spéculation politique. Il m’est alors venu l’idée que la culpabilité dont Catherine faisait mention dans sa lettre se rapportait peut-être à des malversations financières à grande échelle dont elle aurait eu connaissance, mais qu’elle n’aurait pas dénoncé, jusqu’à ce qu’elle change d’avis peu de temps avant sa mort. L’assassin, une personne agissant dans l’ombre des grands, aurait pu vouloir faire le ménage afin qu’on ne remonte pas jusqu’à lui.
― Mais cette hypothèse était assez loin de la solution finale et de l’orphelinat les Aigrettes, fit remarquer miss Mallowan. Comment avez-vous fait le lien entre le comité et l’orphelinat qui a été le théâtre des pires horreurs ?
― Très simplement parce qu’on me l’a dit, se délecta Évariste. En interrogeant les proches de Catherine, je me suis aperçu que le point de rupture entre Catherine et le Comité était la gestion du plus gros orphelinat de la région : l’établissement des Aigrettes. Quelque chose avait eu lieu dans cet établissement qui avait poussé Catherine à claquer la porte du conseil d’administration dont elle était membre et à demander la tenue d’une enquête sur son fonctionnement.
― Cela devait être grave pour qu’elle s’attaque à l’institut qui lui avait permis d’adopter ses deux enfants, alors même qu’elle était célibataire, commenta la vieille femme en sirotant son thé.
― Précisément.
― Je suis curieuse de savoir comme la question de la « classe spéciale » des Aigrettes s’est posée à vous.
― Vous savez, la plupart des gens ne demandent qu’à parler, pontifia Évariste, même lorsqu’ils mentent, ils vous parlent. Et lorsqu’ils le font, il y a toujours quelque chose qui échappe au contrôle de leur pensée. Un brin de spontanéité indécrottable. Isabeau et moi avons donc fini par apprendre que l’orphelinat ne se contentait pas de recueillir des enfants abandonnés. Son directeur, le propre frère du maire de Sainte-Marie mort des années plus tôt, avait décidé de créer une classe spéciale destinée à prendre en charge des enfants handicapés que les familles aisées de la région ne savaient plus comment gérer ou cacher. Équipes formées, apprentissage adapté : tout était censé être mise en œuvre pour améliorer la condition de ces enfants. En réalité, cette classe spécialisée était une sorte de chambre d’exécution destinée à appliquer les préceptes d’une ancienne tradition remontant au XIème siècle.
― Les changeling, poursuivit Isabeau sans pouvoir réprimer un frisson.
― Nous connaissons, hélas, aussi cette légende en Angleterre, ajouta miss Mallowan.
― La ville, la région même, exorcisait ses démons et ses blessures par cette pratique qui consiste à croire que le petit peuple invisible, condamné par Dieu à ne jamais être vu des autres pour avoir commis le péché d’orgueil, avait l’habitude de substituer leur progéniture à celle des humains. En baptisant leurs enfants, les familles humaines leur permettaient de faire partie du royaume de Dieu. Par ce subterfuge, les descendants des fées accédaient au paradis en redevenant visibles aux yeux de Dieu. Or, pour éviter cette manœuvre et sauver les véritables bébés humains, la tradition religieuse prévoyait d’infliger aux changeling présumés les pires maltraitances. Ainsi, les fées, touchées par les cris de leur progéniture abandonnée, devaient finir par craquer et redonner l’enfant enlevé pour sauver le leur. Et plus le nourrisson hurlait sous les tortures, plus cela confirmait que le traitement marchait et que la fée finirait par revenir sur son idée. Si cependant il mourrait, alors c’était un soulagement d’avoir débarrassé le monde de ces rejetons contre-nature. Bien entendu, ce n’était jamais les beaux enfants aux boules blondes et aux grands yeux vifs d’intelligence qui était soupçonnés d’être des changeling. Ceux-là étaient parfaits, donc forcément humains. C’était toujours les enfants handicapés, tordus, brisés, bancales.
Évariste marqua une pause. Son auditoire observa une minute de silence, comme un recueillement. L’homme finit par enchaîner :
― En continuant de creuser, non sans danger croyez-le bien, Isabeau et moi avons découvert que, depuis une quarantaine d’années, Sainte-Marie détenait un record de morts d’enfants en bas âge, la plupart ayant en commun un handicap et un enterrement à la va-vite. De façon plus ou moins continue, la ville pratiquait ce « tri » en croyant conjurer le mauvais sort et la mauvaise fortune.
― C’est à partir de là que vous avez compris qu’il s’agissait d’une vengeance, avança Agatha Mallowan.
― La mort horriblement spectaculaire de Victor Duval, puis celle du père Joachim, le suicide du docteur le plus connu de la ville et le faux accident des Ferrand, tous liés à la mort prématurée d’un enfant handicapé, livrait pour moi le même message : « voyez ce que je fais d’horrible à d’horribles personnes ». Les serpents dans la gorge du prêtre, Duval crucifié, la colonne dénudée et piquée de clous, les Ferrand trépanés avec un tisonnier… L’assassin vengeait la mort des enfants de cette classe honteuse en appliquant aux parents survivants le même stigmate de leur handicap.
― Mais comment pouviez-vous en être certain ? Ces enfants étaient tous morts et les parents concernés ne devaient pas se vanter auprès de vous du drame qu’ils avaient vécus.
― On a dû profaner des tombes pour vérifier les pathologies des corps, annonça Isabeau l’air traumatisé.
― Pardon ? hoqueta Agatha.
― Une enquête demande parfois des investigations un peu audacieuses, éluda Évariste. Mais, passons sur les détails. À ce stade, deux questions subsistaient. Deux questions qui, si j’y répondais correctement, me donneraient la solution. Tout d’abord, quel était le lien entre les morts abominables des parents d’enfant handicapés et celle due à un empoisonnement rapide de Catherine, dont les enfants étaient en tous points parfaits ? Ensuite, quelle personne encore en vie avait ce qu’il fallait pour devenir un vengeur, puisque comme vous l’avez si bien dit, les victimes étaient toutes mortes ?
Se taisant soudain, Évariste ménagea son suspens.
― Quelle a été la réponse à ces deux questions ? demanda son interlocutrice, pas dupe de l’effet de manche d’Évariste.
― Eh bien, en premier lieu, s’il n’y avait aucun lien apparent entre le meurtre de Catherine et les autres, c’est tout simplement parce qu’il y avait deux assassins agissant indépendamment l’un de l’autre et pour des motifs radicalement différents. En second lieu, il y avait en réalité deux enfants handicapés ayant survécu au traitement inhumain des Aigrettes. Deux mots revenaient toujours : invisible et parfait. Le petit peuple était invisible et, à Sainte-Marie, tout devait être parfait. Ou en avoir l’air. Certains handicaps sont invisibles et tout est comme parfait.
― Dorian et Agathe Lozac’mher, anticipa la vieille dame sur un ton de fascination morbide.
― Deux orphelins miraculeusement échappés de cet enfer et assez intelligents pour se faire adopter par une femme libérée et en mal de maternité.
― Ça a dû être un tel déchirement pour vous de le comprendre. Vous étiez ami avec cette famille.
― Et c’est pourquoi j’ai bien failli ne rien comprendre. Si je n’avais pas rencontré par hasard le facteur de Sainte-Marie, jamais je n’aurais réalisé que Dorian m’avait menti sur son emploi du temps et ce pour une bonne raison : il était occupé à tuer le père Joachim. Un premier mensonge en cache souvent d’autres et alors on analyse les choses sous un angle différent. Mais c’est une piètre consolation. Le dénouement malheureux de cette histoire, le suicide d’Agathe et l’empoisonnement de Dorian en prison, me marquera à jamais.
― Et Catherine ? Sa mort ?
― Le pire dans cette horrible histoire, c’est que le meurtre de ma chère amie était simplement motivé par l’argent. Le maire avait besoin de capitaux pour ressusciter les Aigrettes en mémoire de son frère disparu. Il comptait sur la falsification de documents de succession pour empocher une grosse somme. Horriblement classique, cruellement banal.
― Sainte-Marie aura du mal à se remettre de cette histoire.
― Toute la région, vous voulez dire. Tous les notables de cette merveilleuse petite bourgade, ces bourgeois biens sous tous rapports, étaient au courant de ces pratiques. Sans compter sur l’hystérie superstitieuse ambiante. Pendant un temps, Isabeau a bien cru que toutes les apparitions et les phénomènes surnaturels auxquels lui et Agathe étaient étrangement confrontés étaient bel et bien réels. Si je n’avais pas découvert que la ville entière consommait des mélanges à base de belladone pour alimenter sa superstition, Isabeau aurait pu y laisser la vie et je n’aurais jamais creusé du côté de la piste des hommes.
― En somme, il n’y a pas pire monstres que les humains qui se cachent derrière. C’est ce que je raconte dans tous mes livres, conclut miss Mallowan avec fatalisme.
La Côte d’Émeraude et son folklore
Le contraste soulevait le cœur. Au-dessus de l’église, le ciel nuageux était déchiré par endroit,
et la lumière du soleil tenue captive au-delà de la masse, s’échappait de ces plaies célestes en flèches plantées droites dans les toits. Tournée vers le sol, la tête de la jeune fille observait la cour de la paroisse avec une bienveillance navrée. Les membres délicats de son corps virginal, profondément empalé sur la croix en bronze du clocher, ballottaient à chaque coup de vent. S’écoulant avec grâce le long de l’abdomen, percé de part en part, le sang glissait sur les tuiles grises comme les mèches d’une longue chevelure auburn. Au sommet de la façade en pierres, lardée de lierre Gloire de Marengo, le grand vitrail ajouta une nouvelle couleur à sa palette lorsque le fluide sombre atteignit son verre.
Selon l’orientation des trous dans le ciel, la lumière brutale jaillissant des hauts cieux frappait soudain le corps blanc et le faisait scintiller. Le front pâle de la victime était ceint d’une couronne de branchages entrelacés dont l’extrémité de certains ramages pénétrait la peau du crâne en maculant son visage de sillons carmin. Entre les va-et-vient de ses mèches de cheveux clairs, que la brise bougeait comme une ondée, deux billes vitreuses et fixes régnaient chacune dans une cavité orbitale aussi noire que la suie. Elles pointaient en direction d’Évariste.
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